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#3 Frida Kahlo: 7 secrets pour transformer sa souffrance en mission de vie

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Hulton Archive / Getty Images

Qui est Frida Kahlo?

Frida Kahlo, source d’inspiration

Frida Kahlo (1907-1954) est l’une des artistes peintres mexicaines les plus célèbres au monde, métisse de mère d’origine espagnole et indienne et de père d’origine allemande. Elle entre à l’Ecole Nationale Préparatoire, considérée comme le meilleur établissement scolaire du Mexique à l’âge de 15 ans. Elle est jeune, belle et pleine de talents et souhaite devenir médecin. Elle n’envisage alors pas de se lancer dans une carrière artistique, malgré l’intérêt qu’elle porte aux beaux-arts, qu’elle doit à son père, excellent photographe et accessoirement peintre d’aquarelles. Féministe, communiste, anticonformiste, Frida décide dès son plus jeune âge de ne pas suivre le même parcours que la plupart des femmes mexicaines. C’est en effet un destin peu commun que la vie lui réservera. Frappée par la poliomyélite dès l’âge de 6 ans, victime d’un accident grave à 18 ans qui aurait pu lui coûter la vie, elle survivra dans la douleur jusqu’à sa mort à 47 ans. Et c’est dans cette souffrance qu’elle commencera à peindre et fera de sa vie une oeuvre d’art. Ses peintures ont connu un succès planétaire après sa mort, et Frida Kahlo est devenue l’icône mexicaine du XXe siècle, continuant d’inspirer créateurs de mode, artistes, et toute une nouvelle génération de femmes dans le monde. Par son expérience de vie, elle nous montre qu’il est possible de transformer sa souffrance en mission de vie. Voici donc 7 secrets pour faire de vos souffrances vos plus grands trésors.

Frida Kahlo : 7 secrets pour transformer sa souffrance en mission de vie

Secret n°1 : Chaque événement malheureux est une opportunité pour trouver sa voie

L’accident, point de départ de sa peinture

17 septembre 1925. Frida a 18 ans. Alors qu’elle sort du lycée, elle prend le bus pour rentrer chez elle à Coyoacan, quartier colonial au sud de Mexico. A l’angle d’une rue, un tramway arrive. Le bus a à peine le temps de franchir les rails, que le tram le traverse et le projette contre un mur. Une barre de métal transperce le corps de Frida de l’abdomen à la cavité pelvienne et l’éventre. La pointe ébréchée ressort par son vagin. « C’est comme cela que j’ai perdu ma virginité », écrira-t-elle plus tard, dotée d’un sens aigu de la dérision. Le diagnostic des médecins est terrifiant. Colonne vertébrale brisée, col du fémur rompu, elle a onze fractures, son pied droit est broyé, l’épaule gauche définitivement démise, l’os pelvien brisé en trois. Frida survit. Miracle ou supplice ? Ce jour-là, son destin bascule et marque le début d’un calvaire. Elle reste à l’hôpital trois longs mois, avant de rentrer chez elle, demeurant clouée au lit. Emprisonnée dans un corset pour réparer ses fractures, elle souffre le martyr et verse des litres de larmes. Face à cette torture s’offre à elle deux choix : se plaindre sur son sort toute sa vie restante ou se servir de ce drame pour se créer une nouvelle vie. 

« Je ne suis pas morte et j’ai une raison de vivre. Cette raison, c’est la peinture. »

Frida rêvait d’être « navigatrice ou grande voyageuse », et se préparait à devenir médecin. Rien ne la prédisposait à la peinture. Handicapée, condamnée à restée alitée, elle manifeste pourtant l’envie de peindre. Sa mère, qui a déjà perdu un premier fils avant la naissance de Frida, ne vient la voir qu’un mois après son accident, terrorisée de perdre à nouveau son enfant. Sachant cela, elle lui offre une boîte de couleurs, lui fait fabriquer un chevalet sur mesure par un menuisier, installe un baldaquin au-dessus de son lit, avec un miroir en guise de plafond. Face à son propre reflet, Frida commence à exprimer ses angoisses sur la toile. La peinture devient alors pour elle un exutoire pour trouver la force de vivre, de reconquérir son corps et sa liberté. Autodidacte, elle commencera alors une série d’auto-portraits. Tant qu’il reste un soupçon de désir, rien n’est perdu.

« Je me peins moi-même car je suis souvent seule et c’est le sujet que je connais le mieux. »

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Autoportrait à la robe de velours, Frida Kahlo, 1926. Huile sur toile, 78.7×58.4 cm, collection privée.

Secret n°2 : De la souffrance naissent les plus grands chefs-d’oeuvre

« Ma peinture porte en elle le message de la douleur. »

Autoportrait à la robe de velours est seulement son deuxième tableau, qu’elle peint juste après son accident de bus. Elle commence à travailler sur cette peinture à la fin de l’été 1926 lorsque sa relation avec son premier amour, Alejandro, se détériore car il pense que c’est une femme trop libérée. Elle lui écrit une lettre dans laquelle elle lui promet d’être une meilleure personne afin d’être digne de lui. Lorsqu’elle termine cet autoportrait, elle lui écrit : « Dans quelques jours, le portrait sera chez toi. Pardonne-moi si je n’ai pas mis de cadre. Je te demande de l’accrocher à un endroit assez bas, afin que tu puisses le voir comme si tu me regardais. » Elle espère que cette peinture permettra à son amour de ne jamais l’oublier. Ils se retrouvent avant de se séparer définitivement. Alejandro se voit contraint de partir en Europe car ses parents l’interdisent de fréquenter Frida. Elle continue néanmoins de lui écrire de nombreuses lettres, faisant référence à cette peinture comme « ta Botticelli »: Alex, ta « Botticelli » est devenue très triste mais je lui ai dit que jusqu’à ce que tu reviennes, elle devait demeurer dans le silence. Mais malgré cela, elle pense toujours à toi. ». Plus tard, elle écrit : « Tu ne peux pas imaginer comme c’est merveilleux de t’attendre, sereinement comme dans l’autoportrait. » Elle donnait à cette peinture une sorte de pouvoir magique qui pourrait lui permettre de retrouver son amour.
Après le choc traumatique et le chagrin d’amour, elle continue de raconter son drame en couleurs, une thérapie qui mettra au monde de nombreux chefs-d’oeuvres. Les grandes créations naissent en effet souvent d’une grande détresse et de la profondeur de nos souffrances les plus intenses. Dans « Souvenir ou le coeur » (1937), une barre de bus la transperce; dans « Arbre de l’espérance, tiens-toi droit » (1946), elle dessine son dos meurtri; dans « Autoportrait avec le portrait du Docteur Farill » (1951), elle rend hommage à son médecin et se représente à ses côtés, dans un fauteuil roulant; dans « La colonne brisée », datant de 1944, elle dévoile ses blessures au grand jour, son visage, toujours impassible, est inondé de larmes. À cette époque son état de santé s’est aggravé ce qui l’oblige à porter un nouveau corset métallique, souffrance représentée par les clous plantés dans son corps et la peau ouverte laissant apparaître une colonne vertébrale en morceaux, la sienne.
André breton qui l’avait rencontrée quelques années plus tôt dira de son oeuvre :

« L’art de Frida Kahlo de Rivera est un ruban autour d’une bombe. »

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« Arbre de l’espérance, tiens-toi droit », 1946.

Secret n°3 : La passion donne la force de dépasser les épreuves de la vie

Sa passion pour l’art et pour la vie

En dépit de son destin tragique, Frida vit passionnément sa peinture et ses relations. En 1928, alors qu’elle n’a que 21 ans, elle rencontre Diego Rivera, peintre muraliste renommé, à qui elle demande ce qu’il pense de ses premières oeuvres.

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Wallace Marly / Getty Images

Celui-ci tombe amoureux de ses tableaux, puis de l’artiste. L’homme a 21 ans de plus qu’elle. Ils se marient le 21 août 1929 et s’installent à Mexico. Mais cette relation passionnelle amoureuse se dégrade rapidement. Son époux se révèle un homme infidèle, et en 1933, Frida apprend qu’il la trompe avec sa propre soeur Cristina. Profondément blessée, Frida décide de quitter le foyer conjugal et s’installe seule. Le couple divorce. Cette déchirure donne naissance à la peinture « Quelques petites piqûres ». En écho à un fait divers, c’est le visage de Diego qui remplace celui de l’assassin.
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Quelques petites piqûres, Frida Kahlo, 1935. Huile sur métal, 30 x 40 cm, collection de Dolores Olmedo Patiño, Mexico, Mexique.

Frida a le coeur brisé mais c’est une femme libre et pleine de vie. Elle a plusieurs aventures, notamment avec Léon Trotsky, et avec des femmes, assumant pleinement sa bisexualité.
Malgré une relation quelque peu tumultueuse, c’est cet amour et le regard de Diego qui permettra à Frida d’avoir confiance en sa peinture et de poursuivre sur cette voie.

Secret n°4 : La maladie ne peut être une excuse pour ne pas faire ce qui est important

Malade depuis l’âge de 6 ans

La maladie est souvent un obstacle pour réaliser ce qui nous tient à coeur. Bien qu’il puisse véritablement constituer un frein à notre réalisation, on l’utilise souvent à tort comme prétexte pour justifier notre manque de courage à nous consacrer aux choses qui nous importe le plus.
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La vie de Frida Kahlo nous montre concrètement qu’il est possible de réaliser de grandes choses et de suivre sa voie, malgré un état de santé désastreux. Atteinte de poliomyélite à l’âge de 6 ans, victime d’un accident qui lui fera subir plus de trente opérations, elle passe sa vie à l’hôpital ou dans son lit. La fragilité de sa colonne vertébrale l’oblige à porter des engins de torture, et les conséquences de l’accident l’empêchent d’enfanter. Dans les années 50, son état de santé s’aggrave et elle subit sept opérations de la colonne vertébrale. En 1953, elle est amputée de la jambe droite jusqu’au genou à cause d’une gangrène. Elle contracte une pneumonie en 1954 à l’âge de 47 ans qui lui sera fatale et meurt officiellement d’une embolie pulmonaire.
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Durant toute sa vie, Frida peindra 143 tableaux, dont 55 autoportraits.

Secret n°5 : L’amour et le pardon surpassent la douleur

Son amour sans limites

Couple de peintres légendaires, Frida Kahlo et Diego Rivera incarnent la passion amoureuse. Cet amour est tellement fort qu’il survivra aux nombreuses trahisons de l’homme infidèle, et renaîtra de ses cendres, même après le divorce. Frida, bien que déchirée et indignée par l’attitude de son mari lorsqu’il la trompe avec sa soeur, écoute au plus profond d’elle ce qu’elle ressent. En dépit de ses blessures, leur amour pur résiste. Alors que la relation avec sa soeur est terminée, les deux amants se remarient en 1940, le jour de l’anniversaire de Diego. Frida apprend à aimer autrement, et à pardonner les erreurs de son mari, en gardant sa dignité.
À la fin de sa vie, alors qu’elle vient de subir l’amputation de sa jambe, elle est plongée dans une profonde dépression et a des idées suicidaires. Mais son amour l’en empêche et lui fait choisir la vie.

« On m’a amputé la jambe il y a six mois qui me paraissent une torture séculaire et quelques fois, j’ai presque perdu la tête. J’ai toujours envie de me suicider. Seul Diego m’en empêche, car je m’imagine que je pourrais lui manquer. Il me l’a dit, et je le crois. Mais jamais de toute ma vie je n’ai souffert davantage. J’attendrai encore un peu… « 1

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« Diego en mi Pensamiento », 1943

Secret n°6 : La différence est notre plus grande force

Une femme bien singulière

Anticonformiste, Frida Kahlo se définit comme « Fille de la Révolution« . Suite à la révolution du pays entre 1910 et 1920, les femmes se voient cantonnées à leur foyer alors même qu’elles avaient combattu auprès des hommes. Frida fait alors sa deuxième révolution, à travers sa peinture, pour dénoncer cette régression du statut de la femme qu’elle définit comme « une masse silencieuse et soumise ». Féministe engagée, elle s’affranchit des tabous de l’époque et illustre dans son oeuvre la sexualité, l’avortement, la fécondité, l’amour, les souffrances physiques et psychiques. Ces thématiques sont le reflet de sa propre vie, dont elle n’a pas honte, bien au contraire. Elle exprime son identité, sa vie extraordinaire sans se préoccuper du qu’en dira-t-on. Ce n’est pas uniquement son talent d’artiste qui inspire, mais bien sa force de caractère, sa personnalité et son histoire.

« Pourquoi voudrais-je des pieds puisque j’ai des ailes pour voler ? »

A l’âge de 6 ans, elle était déjà une enfant singulière. Atteinte de poliomyélite, elle avait la jambe droite et le pied droit atrophiés, avec un arrêt de croissance du membre, l’obligeant à rester chez elle pendant neuf mois. Elle les dissimulait par trois ou quatre chaussettes. En position assise, le pied droit ne posait pas par terre et la jambe malade était cachée par l’autre. Elle portait une bottine à talonnette et sautillait pour ne pas montrer qu’elle boitait et donner l’impression d’une marche normale. Cela lui valait de multiples railleries. Filles et garçons du voisinage avec leur cruauté enfantine la surnommaient Frida pata de palo (jambe de bois) ou Frida la boiteuse. Soucieuse de son apparence, Frida qui était une très jolie fille, dissimulait sa jambe malade avec des vêtements de garçon ou sous d’amples robes, comme on peut le voir sur « Autoportrait avec un chien Itzcuintli » (1938).

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Autoportrait avec un chien Itzcuintli, 1938. Peinture à l’huile.

Artiste multiple et inclassable, elle refuse l’étiquette de surréaliste qu’on lui attribue souvent.

« On me prenait pour une surréaliste. Ce n’est pas juste. Je n’ai jamais peint de rêves. Ce que j’ai représenté était ma réalité ». 

Secret n°7 : La vie est plus puissante que la mort

Une force de vie exemplaire

Christina Burrus, auteure de « Frida Kahlo » (Editions Gallimard Découvertes), voit dans son malheur la source de son envie de vivre et d’écrire cette vie au pinceau : « Elle a toujours un regard analytique. Elle est malade, elle s’en plaint évidemment à des amis car elle souffre, mais en même temps elle surmonte. Je crois que ses maladies, ses souffrances, sont pour elle une force de vie. »2

« Viva la vida » (« Vive la vie »)

En plus des souffrances provoquées par l’accident, Frida apprend qu’elle ne pourra jamais avoir d’enfant à cause des séquelles physiques considérables touchant ses organes génitaux. Le traumatisme pelvien, responsable du syndrome d’Asherman*, est à l’origine de plusieurs fausses couches. S’ajoute alors au traumatisme physique, la douleur psychologique de ne pouvoir enfanter. En 1932, elle fait sa première fausse couche et peint « L’hôpital Henry Ford ou le Lit volant » depuis son lit d’hôpital, la même semaine, traduisant son impuissance à donner la vie. Elle se représente couchée dans un grand lit devant l’immensité de la plaine, procurant une impression de solitude et d’abandon. Cela reflète les sentiments qu’elle éprouvait suite à la perte de l’enfant.

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Henry Ford Hospital ou Le Lit volant, 1932. Huile sur métal, 32.5cm x 40.2cm, Musée Dolores Olmedo, Mexique. © Collection Museo Dolores/AP/SIPA

La représentation graphique ou picturale à la suite d’un drame vécu est de nos jours un acte thérapeutique utile pratiqué par des psychologues au sein d’une cellule psychologique. Frida en avait saisi elle-même la portée. La même année, elle peint « Naissance ou Ma naissance ».  Frida Kahlo réutilise son expérience de sa fausse-couche pour peindre ce qui semble être sa naissance à elle. Un moyen pour elle de se libérer de ce souvenir qui la hante, de s’en débarrasser par crainte qu’une autre fausse couche ne se reproduise.
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« Ma naissance », 1932.

La tête de l’enfant vient tout juste de sortir de la vulve, l’accouchement n’est pas tout à fait terminé. On ne voit rien de ce qui pourrait être une salle d’accouchement pas de sage femme, pas d’instrument, pas de berceau. Il n’y a qu’elle. Seule sa mère figurant la vierge est représentée dans le tableau accroché au mur. Frida voulait repartir à zéro, elle voulait le faire seule et elle avait  la conviction que personne ne pourrait lui venir en aide.
Sa force mentale et intérieure, sa passion pour la vie, lui ont permis de surmonter chacune de ces tragédies, qui n’ont cessé de l’attaquer jusqu’à son dernier souffle. Elle peint un dernier tableau intitulé « Viva la vida », l’un de ses plus colorés, huit jours avant de s’éteindre le 13 juillet 1954 à l’âge de 47 ans.
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« Viva la vida », 1954.

Elle est incinérée le 14 juillet, comme elle le désirait : elle avait expliqué qu’elle ne souhaitait pas être enterrée couchée, ayant trop souffert dans cette position au cours de ses nombreux séjours à l’hôpital. Ses cendres reposent dans la Casa azul à Coyoacán, sur son lit, dans une urne qui a la forme de son visage.
 
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En résumé…

L’essentiel de Frida Kahlo dans une mindmap (carte mentale)

Mindmap – Les secrets de succès de Frida Kahlo


Reportage : L.hakim / D.Dahan / F.Curtet / G.Liaboeuf
 


Glossaire

  • *Syndrome d’Asherman : développement de cicatrices qui aboutissent à des adhérences ou synéchies intra utérines acquises après traumatisme externe ou interne et qui peuvent obturer la cavité à des degrés de gravité variables.

Notes

Le journal de Frida Kahlo, préfacé par Carlos Fuentes, éditions du Chêne, 1995.
Reportage : L.hakim / D.Dahan / F.Curtet / G.Liaboeuf


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